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Directive TVA 2018/1910: premiers grands changements depuis 2010 !

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Premiers pas vers le système définitif de TVA prévu pour 2022, la directive N° 2018/1910 du 4 décembre 2018 concerne l’harmonisation et la simplification de certaines règles TVA sur les échanges entre les États membres.


Les modifications, qui doivent s’appliquer dans tous les Etats membre le 1er janvier 2020, concernent 3 sujets importants:

  • Les contrats de dépôts – transfert de biens à un client dans l’Union européenne pour facturation ultérieure.
  • Les ventes en chaîne  – quand trois opérateurs sont présents sur une livraison intracommunautaire.
  • L’exonération des livraisons intracommunautaires  – la validité des numéros de TVA et l’établissement de la DEB deviennent une condition de fond.

Contrats de dépôt

Taxation du régime de stocks sous contrat de dépôt à destination d’un autre État membre

Définition du stock sous contrat de dépôt :

Un fournisseur de biens expédie des biens vers un autre Etat membre à l’attention d’un acquéreur déjà connu. Ces biens sont toujours la propriété du fournisseur. La livraison, définie comme le transfert du pouvoir de disposer des biens comme un propriétaire, est réalisée plus tard.

Règles actuelles :

A ce jour, ce type d’opération est considéré comme une acquisition intracommunautaire dans l’État membre d’arrivée des biens, suivie d’une livraison «intérieure» ou « domestique » dans l’État membre d’arrivée. Elle requiert l’identification du fournisseur aux fins de la TVA dans ledit État membre.

Au 1er janvier 2020 :

De telles opérations, lorsqu’elles interviennent entre deux assujettis, devraient être considérées dans certaines conditions comme donnant lieu à une livraison exonérée dans l’État membre de départ et à une acquisition intracommunautaire dans l’État membre d’arrivée. Le fournisseur n’aura alors plus à s’identifier à la TVA dans le pays d’arrivée des biens.

Ces règles de simplification sont exposées à l’article 17 bis de la nouvelle Directive TVA :

  • Les deux parties devront pouvoir justifier de leurs situations de par leurs relations contractuelles.
  • Le fournisseur n’est pas établi ou ne dispose pas d’un établissement stable dans l’Etat membre de destination.
  • Le destinataire des biens est identifié à la TVA dans le pays de destination. Le vendeur devra connaître ce numéro, ainsi que l’identité du destinataire, au moment de l’expédition des biens.
  • Le fournisseur doit établir un registre fiscal des biens expédiés et une Déclaration d’Echanges de Biens expédition.
  • Les biens sont livrés (« vendus ») dans un délai de douze (12) mois.

Si ces conditions sont remplies, au moment de la livraison (« vente »), le fournisseur réalise une livraison intracommunautaire exonérée de TVA de son Etat membre et le destinataire réalise une acquisition intracommunautaire soumise à la TVA de son Etat membre.

Certaines situations plus complexes sont d’ores et déjà prévues par la Directive :

  • Que se passe-t-il si… les biens ne sont pas vendus dans un délai de 12 mois ?
    Les biens deviennent taxables dans l’Etat de destination et entraînent l’identification TVA du vendeur dans cet Etat.
  • Que se passe-t-il si… les biens sont retournés dans l’Etat membre de départ avant l’expiration du délai de 12 mois ?
    Aucune taxation de ces biens dans l’Etat de destination n’est à réaliser si aucune livraison (« vente ») n’a été réalisée et si le fournisseur impute ce retour dans son registre fiscal des biens expédiés.
  • Que se passe-t-il si… le destinataire des biens est modifié ?
    Aucune taxation de ces biens dans l’Etat de destination n’est à réaliser si les conditions décrites ci-dessus sont respectées (délai, modification dans le registre fiscal des biens expédiés et dans la DEB expédition).
  • Que se passe-t-il si… les biens sont finalement destinés à un autre Etat membre de l’UE ?
    Attention ici, le fournisseur devra s’identifier à la TVA dans l’Etat de destination des biens.
  • Que se passe-t-il si… les biens sont finalement détruits, perdus ou volés ?
    La taxation de biens sera à constater, le fournisseur devra donc s’identifier à la TVA dans l’Etat de destination des biens.

Ventes en chaîne

Ventes successives au départ d’un Etat membre de l’Union européenne

Règles actuelles :

Il convient ici de parler de jurisprudences assez récentes. Les règles de la nouvelle directive viennent donc clarifier des situations à risques. Ces situations peuvent être résumées comme suit.
Un opérateur B s’entremet, via une opération d’achat-revente de biens, entre son fournisseur A et son client C – le flux de biens part de l’Etat membre de l’UE 1 vers l’Etat membre de l’UE 2.
Si les livraisons (A vers B, puis B vers C), c’est à dire le transfert du pouvoir de disposer des biens comme un propriétaire, se situent toutes  dans l’Etat 1 ou dans l’Etat 2, certaines ventes doivent être soumises à la TVA de l’Etat 1 ou de l’Etat 2, et donc possiblement nécessiter l’identification TVA de l’opérateur B dans l’Etat 1 ou l’Etat 2…

Au 1er janvier 2020 :

Les opérations en chaîne concernent des livraisons successives de biens qui font l’objet d’un transport intracommunautaire unique. Le mouvement intracommunautaire de biens ne devrait être imputé qu’à une seule des livraisons, et seule ladite livraison devrait bénéficier de l’exonération de TVA applicable aux livraisons intracommunautaires. Les autres livraisons dans la chaîne devraient être taxées et pourraient nécessiter l’identification à la TVA du fournisseur dans l’État membre de livraison.
Tentons de vulgariser l’article 36 bis de la directive…

  • Etat membre de départ des biens : Etat 1
  • Etat membre d’arrivée des biens : Etat 2
  • Ventes en chaîne : A établi dans l’Etat 1 –> B et C établis dans l’Etat 2

L’article 36 bis évoque deux situations possibles :

  • Seul A pourra réaliser sa vente en exonération de TVA de l’Etat 1. Cela sous-entend que B devra constater une acquisition intracommunautaire soumise à la TVA locale de l’Etat membre 2 suivi d’une vente domestique soumise à la TVA locale de l’Etat 2.
  • Si par contre B est identifié à la TVA dans l’Etat de départ des biens, B pourra réaliser sa vente en exonération de TVA. Cela sous-entend que B devra acheter les biens TTC (TVA de l’Etat 1 incluse), puis revendre ces biens en exonération de TVA de ce même Etat. S’en suivra donc une situation de crédit de TVA pour B dans l’Etat 1.

Attention, certains points réglementaires ne peuvent être analysés en l’état.
Nous devrons attendre des commentaires et doctrines pour évoquer les aspects des ventes triangulaires notamment…

L’exonération des livraisons intracommunautaires

Le numéro de TVA intracommunautaire des clients et la DEB expédition deviennent une condition de fond pour l’exonération des livraisons intracommunautaires.

Le nouvel article 138 énonce que, si le fournisseur ne respecte pas les obligations qui lui incombent en matière de validation des numéros de TVA et de déclaration d’échanges de biens expédition, l’exonération ne s’applique pas.Dans quelles situations doit-on vérifier les numéros de TVA intracommunautaires ?Les entreprises qui ont des relations commerciales avec des partenaires européens (clients ou fournisseurs) doivent vérifier la validité des numéros de TVA intracommunautaire de leurs partenaires dans chacune de ces situations :

  1. Vente intracommunautaire de biens
    L’acquéreur doit disposer d’un numéro de TVA intracommunautaire valide et d’une activité réelle; c’est une des conditions de l’exonération des livraisons intracommunautaires (article 262 ter I du Code Général des Impôts). La seule façon de s’assurer du respect de cette condition est de valider régulièrement les numéros de TVA de ses clients. En cas de numéro invalide, le vendeur encourt un risque de remise en cause de l’exonération appliquée, entraînant un rappel de TVA assorti de majorations et d’intérêts de retard.
    Attention, le numéro de TVA intracommunautaire doit appartenir à l’acquéreur des biens, c’est-à-dire la personne qui dispose des biens comme un propriétaire lors de l’introduction de ces biens dans un Etat membre de l’Union Européenne. De nombreux paramétrages informatiques prennent en compte, à tort, le numéro de TVA du destinataire des biens. Le numéro de l’acquéreur devra en outre apparaître sur les factures de vente et les Déclarations d’Echanges de Biens du vendeur.
  2. Vente intracommunautaire de services
    Les mêmes principes s’appliquent également en matière de prestation de services, notamment lorsque le lieu de taxation est déterminé par la qualité d’assujetti du preneur (règles de principe exposées aux articles 44 et 196 de la Directive 2006/12/CE).
    Ici, les flux de services entre assujettis font l’objet de déclarations périodiques dénommées Déclaration Européenne de Services pour les prestations qui doivent obligatoirement renseigner les numéros de TVA intracommunautaires des opérateurs concernés.
  3. Achat intracommunautaire de biens
    Le régime de l’autoliquidation de TVA s’applique dans le cas de biens facturés par un fournisseur établi et identifié à la TVA en Union européenne, ces biens en provenance d’un Etat membre de l’UE étant livrés en France. Le droit à déduction s’applique lorsque la TVA est exigible : la déduction de TVA s’applique donc, si certaines conditions de fond et de forme sont respectées, au titre de la même période que le paiement de la TVA. Voilà pourquoi la plupart des autoliquidations n’entraînent pas de décaissement de TVA. Les opérateurs ont tendance à qualifier trop vite cela en « opération blanche » ! Mais… attention le droit à déduction peut être rejeté dans les cas suivants :
    – les factures d’achat ne comportent pas le numéro de TVA intracommunautaire du fournisseur;
    – le fournisseur n’est pas identité à la TVA au sein de l’Union européenne (cas d’un fournisseur basé hors UE et réalisant des opérations de négoce en UE);
    – les factures d’achat ne comportent pas votre numéro de TVA intracommunautaire (aucun numéro ou un numéro erroné).
  4. Régime de TVA sur la marge….
    Le négoce de véhicule d’occasion est un secteur d’activité très sensible est très exposé aux risques de fraude TVA. Un négociant devra ici systématiquement valider les numéros de TVA intracommunautaires de tous ses partenaires, que ceux-ci soient établis en France ou dans un autre Etat membre de l’Union européenne ! En effet, les opérations d’achat relatives à des véhicules d’occasion en provenance d’un autre Etat membre de l’Union européenne sont très sensibles, que le véhicule soit acheté directement auprès du fournisseur initial ou auprès d’autres fournisseurs dans le cas de transactions en chaîne. Il existe, depuis plusieurs années, une solidarité entre les différents acteurs d’une chaîne d’achat-revente dans ce secteur.
    Ici aussi, seule la validation du numéro de TVA intracommunautaire de vos partenaires pourra sécuriser vos opérations de négoce.
  5. Et autres détections de fraudes
    La vérification du numéro de TVA intracommunautaire est un des éléments principaux de la lutte contre la fraude à la TVA. La fraude à la TVA est un risque que les sociétés doivent appréhender et maîtriser afin de ne pas être tenues pour responsables en raison d’un défaut de vigilance.
    Le contrôle des numéros de TVA figure également dans la liste des contrôles clés publiée par la DGFIP sur son site internet dédié à la lutte contre la fraude TVA.
    L’absence de contrôle sur cet élément pourrait amener l’Administration fiscale à considérer que la société n’a pas entrepris toutes les démarches nécessaires afin de s’assurer que son intervenant est en règle et sanctionner la société.
    L’intensification de ces contrôles par les autorités fiscales oblige les sociétés, quelle que soit leur taille, à améliorer leurs contrôles internes.
    Ces contrôles doivent permettre :
    • d’identifier des indices de risque de fraude avant d’entrer en relation commerciale avec un client ou fournisseur ;
    • de renforcer les contrôles liés au statut TVA des clients ou fournisseurs ;
    • de constituer un dossier pour chaque client(s) / fournisseur(s) ;
    • de vérifier régulièrement l’évolution des activités et de l’existence des intervenants ;

Comment procéder pour la validation des numéros de TVA intracommunautaires ?

L’outil VIES (VAT Information Exchange System – système d’échange d’informations en matière de TVA) administré par la Commission Européenne permet un accès en ligne aux bases de données nationales répertoriant les numéros de TVA de chaque assujetti européen. Il ne s’agit donc pas d’une base de données en tant que telle mais plutôt d’un moteur de recherche qui interroge les bases TVA nationales pour vérifier la validité d’un numéro de TVA intracommunautaire donné.
L’interrogation des bases nationales via VIES retourne deux types de résultats: numéro valide ou invalide. Il permet également de vérifier le « propriétaire » du numéro de TVA, élément aussi très important…
Il n’existe pas de base de données européenne permettant de trouver le numéro de TVA d’une entreprise à partir de son nom ou sa raison sociale.

Attention ! Vous devez renseigner votre numéro de TVA intracommunautaire ainsi que celui de votre partenaire afin de disposer d’un code alphabétique de consultation. En cas de litige avec les Administrations, seul ce code prouvera que vous avez réalisé cette démarche !

Pourquoi un numéro de TVA intracommunautaire serait invalide ?

Un numéro de TVA peut être invalide pour plusieurs raisons :

  • le numéro n’existe pas;
  • il n’a pas été activé pour des opérations entre Etats membres, dites « intracommunautaires« . Certains états membres demandent en effet à leurs opérateurs, dans le cadre de mesures de lutte contre la fraude, de prouver qu’ils vont réellement réaliser des opérations intracommunautaires afin d’activer leur numéro dans la base VIES;
  • la base de données nationale n’est pas à jour. A l’inverse, un numéro de TVA valide pourra en réalité correspondre à un numéro radié mais dont la radiation n’a pas encore été intégrée dans la base de données nationale. Aussi, dans certains cas, il peut être nécessaire d’interroger directement les administrations nationales selon leur procédure respective.

Et si vous mettiez en place un système de contrôle ?

Auteur: NDAsta

Nicolas D'Asta
Formateur, consultant, expert sur les thématiques TVA France et international, Nicolas D’Asta dirige, depuis Nice, MATHEZ FORMATION, MATHEZ INTRACOM et EASYTAX. Plus >Le contacter

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