Meta et TVA : L’Italie remet en cause la gratuité des réseaux sociaux

L’Italie frappe fort. En réclamant plus d’un milliard d’euros à Meta, LinkedIn et X (ex-Twitter), le fisc italien pose une question explosive : les services numériques “gratuits” doivent-ils être soumis à la TVA ? Si Bruxelles valide cette interprétation, c’est tout le modèle économique des géants du web qui pourrait vaciller.


Peut-on réclamer la TVA sur les services gratuits de Meta ?

En principe, un service gratuit n’est pas concerné par la TVA, puisqu’il n’y a pas de paiement.
Une opération doit être réputée faite à titre gratuit lorsqu’aucune contrepartie financière ou en nature n’est prévue. Tel n’est pas, bien entendu, le cas en matière d’échange, dès lors que la compensation financière qui intervient entre les deux échangistes confère à l’opération un caractère onéreux.

Mais selon le fisc italien, ce n’est pas le cas des réseaux sociaux comme Facebook, Instagram ou LinkedIn. L’accès semble gratuit, mais en réalité, les utilisateurs « offrent » leurs données personnelles (âge, localisation, centres d’intérêt, comportements de navigation…), qui sont ensuite exploitées commercialement par les plateformes pour vendre de la publicité ciblée.

Autrement dit : l’utilisateur ne paie pas avec de l’argent, mais avec ses données, qui ont une valeur économique réelle pour META. Pour l’administration italienne, cela constitue une forme de contrepartie non monétaire, ce qui justifierait l’application de la TVA.

C’est cette logique d’échange de valeur (accès au service contre données exploitables commercialement) qui a conduit l’Italie à considérer qu’il s’agit d’une prestation taxable. Selon les autorités, la valeur de ces données doit être assujettie à la TVA.

Pour approfondir ces différents sujets, vous pouvez vous inscrire à une formation TVA développées par des experts fiscalistes.

Est-ce que Meta facture la TVA à ses clients ?

Oui, Meta facture bien la TVA sur ses prestations publicitaires, en fonction de la localisation de ses clients :

Pour les prestations fournies à des personnes assujetties établies en Union Européenne (un numéro de TVA intracommunautaire valide constitue une présomption suffisante), la facturation se fait hors TVA (TVA à 0%, le paiement de la TVA étant à la charge du client). Par contre si les prestations sont fournies à des personnes non assujetties (particulier, certaines associations par exemple ou les entreprises sans numéro valide), Meta applique la TVA locale du pays de résidence.

Faut-il un numéro de TVA intracommunautaire pour faire de la publicité sur Meta ?

Oui, pour bénéficier d’une facturation sans TVA (autoliquidation), il est indispensable de renseigner un numéro de TVA intracommunautaire valide dans votre compte Business Manager. Sans cela, la TVA locale sera appliquée, vous pouvez consulter tous les taux de TVA en vigueur en Europe.

Pourquoi l’Italie réclame-t-elle plus d’un milliard d’euros ?

Tout est parti d’une enquête ouverte par la Guardia di Finanza en 2021. Depuis, le fisc italien demande :

  • 888 millions d’euros à Meta, pour la période 2015-2021
  • 140 millions à LinkedIn
  • 12,5 millions à X
Habituellement, ces litiges se règlent à l’amiable – comme avec Airbnb (561 M€ en 2023) ou Google (326 M€ en 2024). Mais cette fois, aucun accord n’a été trouvé, tant les conséquences sont lourdes.

Quelles seraient les conséquences si Bruxelles valide la position italienne ?

L’affaire dépasse l’Italie. En effet, les règles européennes en matière de TVA sont harmonisées. Si une prestation est soumise à la TVA dans un pays, elle doit l’être dans tous les États membres.

Cela pourrait :

  • Imposer la TVA sur tous les services gratuits en Europe, dès lors qu’il y a échange de données
  • Affaiblir le modèle économique “freemium” de nombreux acteurs numériques
  • Coûter plusieurs milliards par an à Meta et ses concurrents

Le sort du modèle « gratuit contre données » est désormais entre les mains de Bruxelles

La Commission européenne a été saisie. Le Comité de la TVA, composé d’experts indépendants, doit se prononcer. Bien que son avis soit consultatif, il est généralement suivi par les États membres.

L’abonnement payant de Meta : un aveu implicite de la valeur économique des données

Face aux pressions fiscales et réglementaires, Meta a lancé en 2023 une offre d’abonnement payant (notamment en Europe) permettant aux utilisateurs d’utiliser Facebook et Instagram sans publicité. Ce choix stratégique a deux objectifs :

  • Se conformer au RGPD en matière de consentement publicitaire
  • Diversifier ses sources de revenus.

Mais pour l’administration fiscale italienne, cette évolution confirme de façon indirecte que les données personnelles ont bien une valeur marchande.

Pourquoi ? Parce que Meta propose désormais aux utilisateurs un choix explicite :

  1. Utiliser la plateforme gratuitement mais en acceptant que leurs données soient utilisées à des fins publicitaires ;
  2. Payer un abonnement mensuel (environ 10 à 13 €/mois) pour ne plus être suivi ni ciblé.

Ce modèle établit une équivalence entre les données personnelles et une valeur monétaire concrète.
Pour le fisc italien, cela renforce l’argument selon lequel les utilisateurs ne sont pas de simples “visiteurs gratuits” mais bien des “contributeurs de valeur”. Et si un service a une valeur et une contrepartie, même non monétaire, il peut être requalifié en prestation taxable au regard de la TVA.

Ceci arrive en complément de la fiscalité pour les e-commerçants faisant de la publicité en ligne et s’ajoutent aux règles de TVA pour le e-commerce déjà existantes.

Autres questions fréquentes sur TVA & publicité en ligne

Meta peut-il récupérer la TVA sur ses propres dépenses en Europe ?

Oui, comme toute entreprise assujettie, qui engage des dépenses pour les besoin de son activité économique, Meta peut récupérer la TVA déductible dans les conditions de droit commun.

Est-ce que les autres plateformes sont concernées ?

Google, TikTok, Snapchat… Tous les modèles reposant sur un accès gratuit contre données pourraient être concernés.

Faut-il déclarer les publicités Meta dans sa comptabilité ?

Oui. Si vous êtes une entreprise, les factures Meta doivent être enregistrées, même si elles sont en autoliquidation. En France, elles doivent apparaître dans les lignes spécifiques de la déclaration de TVA.

Est-ce un tournant fiscal pour les géants du numérique ?

La décision italienne pourrait faire jurisprudence en Europe. Derrière la question technique de la TVA, c’est une requalification du modèle économique du web gratuit qui est en jeu. Affaire à suivre de très près.

Inscription newsletter
Sommaire
Table of Contents
Référent TVA intracommunautaire et internationale
Devenez expert/référent TVA internationale dans votre  organisation ! Conformité aux règles de TVA, obligations connexes applicables aux échanges internationaux : un parcours certifiant complet, sur 3 jours, éligible CPF.
TVA intracommunautaire et extracommunautaire
Sécurisez vos échanges à l’international au plan fiscal et douanier : cette formation TVA sur 1 jour, extrêmement pratique, répond aux besoins opérationnels courants, y compris pour la VAD / e-commerce.
Opérations de construction-vente
Destinée aux experts-comptables, notaires et professionnels de l’immobilier, cette formation détaille les implications fiscales liées au choix du support juridique, les particularités comptables et fiscales lors des opérations de construction et de vente de biens.