TVA sur les voitures de fonction : règles et opportunités pour les entreprises

La TVA sur l’achat d’un véhicule de tourisme est-elle déductible par une société ? 
La mise à disposition d’une voiture de société à un salarié doit-elle être soumise à la TVA ?
Le rescrit du 30 avril 2025 de l’administration fiscale française a clarifié les règles applicables.

L’évolution réglementaire : fin de l’incertitude

Pendant des années, la question de la TVA sur les voitures de fonction a créé une véritable zone grise juridique. Les décisions contradictoires du Tribunal administratif de Nice (2020) et de la Cour administrative d’appel de Lyon avaient semé le doute dans la profession.

La Cour de justice de l’Union européenne (affaire C-288/19, janvier 2021) puis le rescrit français du 30 avril 2025 ont apporté la clarification tant attendue.

Le principe est désormais clair : la TVA peut être déduite et la mise à disposition d’un véhicule de société doit être soumise à la TVA.
Cette mise à disposition constitue une opération imposable à la TVA dès qu’il existe un lien direct entre le service reçu par l’employé et la contrepartie reçue par l’employeur. Une interprétation qui élargit considérablement le champ d’application de la TVA dans les relations employeur-salarié.

Quand la TVA s’applique-t-elle sur les voitures de fonction ?

En théorie, la relation entre employeur et salarié n’entre pas dans le champ d’application de la TVA, car elle ne repose pas sur un lien entre personnes indépendantes. Ainsi, les mises à disposition d’un bien au profit d’un salarié ne sont pas imposables à la TVA, sauf si une contrepartie identifiable est versée ou consentie.

Application de la TVA sur les voitures de fonction : la condition de contrepartie

La TVA s’applique si l’employé fournit une contrepartie en échange de l’usage privatif du véhicule. Mais attention : l’administration fiscale interprète cette notion de manière particulièrement extensive. Cette contrepartie peut prendre plusieurs formes :

  • Avantage en nature déclaré sur le bulletin de paie
  • Renonciation à une partie de la rémunération
  • Participation financière aux frais du véhicule
  • Et plus généralement, tout élément qui pourrait s’apparenter à un échange

Dans les faits, il devient difficile pour une entreprise de prouver qu’il n’existe aucune contrepartie, même indirecte, dans la mise à disposition d’un véhicule de fonction.

En pratique, cela signifie que la plupart des mises à disposition de véhicules de société aux salariés résidant en France rendent désormais les entreprises, françaises comme étrangères, redevables de la TVA française sur la portion d’usage personnel du véhicule.

Exonération de TVA sur les voitures de fonction

Si aucune contrepartie n’est fournie par le salarié, la mise à disposition d’un véhicule par un employeur n’est pas imposable à la TVA. C’est le cas lorsque l’employeur offre l’usage du véhicule sans compensation.

La qualification en « location de moyen de transport longue durée » : une solution à double tranchant

La qualification juridique est importante : il y a location de moyen de transport lorsque le propriétaire cède à un tiers, contre un loyer et pour une durée convenue, le droit d’utiliser un véhicule et d’en exclure d’autres personnes.

La mise à disposition d’un véhicule de société à un salarié peut donc constituer une location de moyen de transport longue durée, avec toutes les conséquences fiscales qui en découlent.

Inconvénient : obligation de facturer la TVA

  • L’entreprise devient redevable de la TVA sur l’avantage accordé au salarié
  • Nouvelles obligations déclaratives et de facturation interne
  • Risques de contrôle en cas de non-respect

Avantage : droit à déduction étendu

  • Possibilité de récupérer la TVA sur l’achat ou la location du véhicule
  • Déduction de la TVA sur les frais d’entretien et de réparation
  • Récupération possible sans abattement lié à l’usage privatif

Le calcul à faire : dans de nombreux cas, la TVA récupérable en amont peut être supérieure à la TVA due sur l’avantage accordé au salarié, créant un avantage net pour l’entreprise… à condition de respecter scrupuleusement les obligations déclaratives.

Cas particulier : les salariés détachés à l’étranger

L’article 259 A du CGI prévoit une règle spécifique : lorsqu’un salarié est détaché dans un État membre de l’Union européenne différent de celui de son employeur, la mise à disposition du véhicule constitue une prestation de service imposable dans l’État membre de détachement.
Les locations de longue durée (plus de 30 jours pour les véhicules terrestres) sont en effet imposables, dans une relation B to C, au lieu d’établissement du preneur.

Points d’attention :

  • La base d’imposition correspond à l’avantage en nature
  • Déclaration possible via le guichet unique OSS
  • Déduction de TVA possible sans abattement lié à l’usage privatif

Les opportunités de récupération de TVA : une contrepartie insuffisante ?

Cette clarification ouvre certes des opportunités pour les entreprises, mais il convient de relativiser leur portée face aux nouvelles obligations.

Déduction de la TVA en amont : un avantage théorique

Les entreprises peuvent désormais déduire la TVA supportée sur :

  • L’achat des véhicules de tourisme
  • La location longue durée
  • Les frais de réparation et d’entretien

Cette déduction est possible sans abattement selon la durée d’usage privatif. Cependant, attention : cette déduction implique souvent une obligation de déclarer la TVA sur la mise à disposition, créant un cercle où l’avantage fiscal peut être rapidement gommé par les nouvelles obligations.

Conseils pratiques

Audit de la flotte automobile

Il convient d’examiner pour chaque client :

  • Les termes contractuels de mise à disposition
  • La matérialisation de la contrepartie (bulletin de paie, accord d’entreprise)
  • Le mode de détention des véhicules (achat, location, leasing)
  • La catégorie des véhicules concernés

Documentation recommandée

Pour sécuriser la position fiscale :

  • Formaliser les accords de mise à disposition
  • Documenter les contreparties (avantages en nature, participations)
  • Tenir un registre d’utilisation privé/professionnel
  • Conserver les justificatifs de TVA déductible

Cas des navettes d’entreprise

Une attention particulière doit être portée aux navettes mises à disposition pour transporter les salariés. Les conditions de mise en place doivent être analysées pour déterminer le régime TVA applicable.

L’alignement de la France sur la jurisprudence européenne met certes fin à des années d’incertitude, mais cette évolution s’inscrit dans une logique d’extension continue du champ d’application de la TVA.

La réalité pour les entreprises : une complexification administrative supplémentaire, des risques de contrôle accrus, et des « opportunités » qui s’accompagnent souvent de nouvelles obligations fiscales. La promesse de récupération de TVA peut rapidement se transformer en piège pour les entreprises non préparées.

Cet article s’appuie sur le rescrit BOI-RES-TVA-000161 du 30 avril 2025 et les jurisprudences européennes récentes. Pour une analyse personnalisée de votre situation, n’hésitez pas à nous consulter.

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