Décision “39 Promenade” : crédit de TVA, remboursement et formalités

Le crédit de TVA représente un excédent de TVA déductible par rapport à la TVA collectée par une entreprise. Ce crédit peut être soit reporté sur les périodes suivantes pour compenser une future dette de TVA, soit remboursé par l’administration fiscale. Cependant, pour conserver ce crédit, l’entreprise doit respecter strictement les exigences de déclaration. Le manque de rigueur dans ce domaine peut avoir des conséquences importantes, comme l’illustre l’affaire « 39 Promenade », où une entreprise a perdu ses crédits de TVA en raison de déficiences dans ses déclarations fiscales.

Résumé de l’affaire “39 Promenade”

Les premier et deuxième trimestres 2010, la société 39 Promenade souscrit deux déclarations périodiques de TVA faisant apparaître un crédit de TVA d’un montant de 135 935 euros. Pourtant, l’administration fiscale refuse de lui rembourser ces montants. 

Plus tard, la société 39 Promenade est soumise à une vérification de comptabilité pour l’année 2012. L’administration fiscale lui propose un redressement en conséquence des omissions relevées dans ces déclarations de TVA au titre de l’année 2012.

Afin de réduire sa dette TVA, la société soutient que ce crédit de TVA vient en réduction des montants TVA pour lesquels elle est redressée. Sans surprise, l’administration fiscale ne l’entend pas ainsi. Le litige se retrouve donc devant les juges.

Le 20 juillet 2020, le tribunal administratif de Toulon rejette la demande de la société “39 Promenade”. Le 9 décembre 2022, c’est au tour de la Cour administrative de Toulon de la débouter. Enfin, la demande sera rejetée par le Conseil d’Etat dans une décision du 18 juin 2024.

Le Conseil d’Etat relève que :

  • La Société requérante n’a pas reporté son crédit de TVA sur sa déclaration du troisième trimestre 2012 ;
  • La Société n’a pas réparé son omission de report dans les déclarations ultérieures déposées avant le 31 décembre 2012.

En conséquence, les juges de la Haute cour administrative française considèrent que l’administration fiscale a raison d’estimer que le droit de la Société au report du crédit de TVA est périmé.

En conclusion, le Conseil d’État rappelle qu’en TVA les conditions de forme sont aussi importantes que les règles de fond. Ainsi, une société qui ne respecte pas scrupuleusement les conditions de forme nécessaires à l’octroi d’un remboursement de crédit TVA perd son droit au remboursement.

Rigueur des administrations fiscales sur le remboursement de TVA

Les administrations fiscales des Etats membres sont particulièrement strictes lorsqu’il s’agit de rembourser de la TVA aux entreprises. Elles attachent beaucoup d’importance aux formalités afin d’encadrer le droit à déduction des entreprises.

En Italie, les règles sont très sévères : après avoir remboursé un crédit de TVA, l’administration fiscale peut le récupérer pendant deux ans et mène des enquêtes bien plus poussées que l’administration fiscale française sur les activités des entreprises à l’origine d’un crédit TVA.

En France, la rigueur de l’administration fiscale est soutenue par les différentes juridictions. Vous trouverez ci-après quelques décisions significatives des juges français en matière de crédit TVA :

  • Cour Administrative d’Appel de Paris, (19 février 2009, n°0APA1498, SNC Kimberly Clark): les juges d’appel ont considéré que l’inscription distincte des déductions de TVA est une condition de forme essentielle pour obtenir ce droit. Le non-respect de cette inscription justifie un refus de déduction, même si les exigences de fond sont remplies. En effet, l’absence d’inscription rend impossible le contrôle de l’administration fiscale et son devoir de lutte contre la fraude fiscale.
  • Jurisprudence Européenne (27 septembre 2007, aff 146/05, et 8 mai 2008, affaire 95/07 et 96/07): la CJCE (Cour de justice de l’Union européenne) estime que l’absence d’inscription des déductions méconnait le principe de proportionnalité européen. Ce principe considère que les pouvoirs de contrôle de l’administration fiscale sont nécessaires et doivent être appliqués à la lutte contre la fraude fiscale sans porter atteinte, de manière disproportionnée, aux libertés individuelles.
  • Conseil Constitutionnel (18 juin 2012, n°2010-5 QPC, SNC Kimberly Clark): le conseil a déclaré que la péremption du droit à déduction est conforme à la Constitution française. En effet, l’article 273 1, alinéa 3 du code général des impôts habilite le pouvoir réglementaire à fixer la date à laquelle les déductions de TVA peuvent être opérées.
  • Cour de Justice de l’Union européenne: la CJUE (Cour de Justice de l’Union Européenne) a confirmé que le délai de deux ans pour l’exercice du droit à déduction est compatible avec la directive TVA.

Cette décision est l’occasion de rappeler que les formalités TVA sont d’une importance capitale pour votre société. Ne prenez pas le risque de faire une erreur et consultez un expert qualifié au moindre doute.

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